Histoire de l'institution
Au commencement : une initiative de sauvegarde
Après quelques timides tentatives d'avant-guerre, une section des archives économiques et du microfilm est créée aux Archives nationales en 1949.
En 40 ans d'existence, elle collectera plus de 200 fonds d'archives.
L'histoire de ce que l'on n'appelle pas encore les "archives du monde du travail" commence en France en 1926 : les premiers fonds d'archives d'entreprises entrent dans des dépôts publics d'archives grâce aux efforts de l'inspecteur général des bibliothèques et des archives.
Sa démarche est confortée par une circulaire du ministère de l'Instruction publique : les archivistes départementaux sont priés de se rendre dans les entreprises en liquidation et d'y prélever "les documents offrant un intérêt pour l'histoire économique".
Mais la France est en retard par rapport à certains voisins européens et nord-américains dont les politiques de l'époque sont plus développées et plus ambitieuses.
En 1949, Charles Braibant, directeur général des Archives de France, crée une "Section des archives privées et économiques et du microfilm" au Archives nationales qu'il confie à Bertrand Gille. La section doit recueillir les archives d'entreprises, les classer et les rendre accessible aux chercheurs.
Quatre responsables de section se succéderont en quatre décennies de préservation de l'histoire économique française. Prospection, important travail de classement mais aussi sensibilisation par des conférences ou cours d'archivistiques furent le quotidien de la section.
Le tournant des années 1980 et l'installation à Roubaix
En 1993, est inauguré le centre des archives du monde du travail (CAMT) à Roubaix.
Le centre accueille les fonds transférés des Archives nationales et poursuit la collecte.
Durant les années 1980, le patrimoine industriel est mis en avant et intéresse de plus en plus la recherche. Chez les entreprises comme les centrales syndicales, la prise de conscience est là : leurs archives ont une réelle valeur.
L'arrivée de François Mitterrand à la présidence de la République voit l'émergence d'un projet ambitieux : doter la France de cinq centres interrégionaux d'archives dédiés au monde du travail.
Pour le premier centre, le choix se porte sur la région Nord-Pas-de-Calais. Et en effet, il y a urgence ! La désindustrialisation l'a frappée de plein fouet, la période est capitale si on veut préserver de précieuses traces d'un passé économique florissant. Le bâtiment choisi s'avère symbolique : une immense usine désaffectée, au cœur de l'ancien fleuron du textile nordiste : Roubaix.
Le Centre des archives du monde du travail commence à fonctionner dès 1986 sous la forme d’une cellule de préfiguration. La collecte est alors exclusivement ciblée vers les entreprises, syndicats, associations et même architectes de la grande région Nord.
Après quatre années de travaux, le ministre de la Culture et de la Francophonie Jacques Toubon inaugure le 5 octobre 1993 le nouveau centre et la salle de lecture ouvre au public.
La reconnaissance d'une compétence nationale
Par arrêté du ministère de la Culture, le CAMT devient service à compétence nationale et prend le nom d’Archives nationales du monde du travail en 2007.
Dès 1994, il était devenu coordinateur national avec un territoire étendu à l’ensemble de la France.
Entre le début du projet et l'inauguration, le contexte politique a changé : il n'y aura pas d'autres centres interrégionaux.
Dès 1994, la Direction des Archives de France confie un rôle de coordination nationale au CAMT. La collecte délaisse donc la région Nord-Pas-de-Calais pour s’intéresser exclusivement aux archives d’ampleur nationale (voire internationale). Les Archives départementales et municipales reprennent leur rôle à l'échelon local.
Le CAMT est devenu le 1er janvier 2007 un "service à compétence nationale" rattaché au ministère de la Culture : il est rebaptisé à cette occasion "Archives nationales du monde du travail".
En 2020, le projet scientifique, culturel et éducatif des ANMT réaffirme cette dimension nationale et redéfinit le concept d'archives du monde du travail en le recentrant autour des archives produites par :
- les entreprises ;
- les syndicats ;
- les comités d'entreprises ;
- les associations œuvrant dans le monde du travail ;
- les associations de lutte contre la pauvreté.
Pour aller plus loin :
Au fil des archives : le travail c'est tout un monde !, catalogue d'exposition, Archives nationales du monde du travail, Roubaix, 2014.
ROUSSEL Frédérique, "Roubaix, au fin fonds des entreprises", Libération.fr, 3 février 2015.